Ramzi Aburedwan , "L'archet de la paix", à Fontaine, les 27 et 28 novembre
Mardi 27 novembre, 18 heures à Fontaine, auditorium de la Source
Projection du film « L’archet de la paix » (production Arte )
en présence du violoniste Ramzi Aburedwan, fondateur du groupe Dal’Ouna
Mercredi 28 novembre à 19 h 30 à Fontaine, auditorium de La Source
Musique et chants de Palestine avec Ramzi Aburedwan et l’ensemble Dal’Ouna
tarif à 8, 10 et 12 €
LA SOURCE : 38 AVENUE LÉNINE - FONTAINE - TRAM A - STATION HÔTEL DE VILLE
Palestine : l’archet de la paix
Réalisateurs : Solène DOERFLINGER, William IRIGOYEN, Isabelle NOMMAY
Durée : 55 min
Production : ARTE GEIE / Archives Bonobo Productions – France 2012
Ramzi Abu Redwan aurait pu continuer dans l’activisme, sous la bannière de telle ou telle faction. Il a pris une toute autre trajectoire.
Dans le camp d’Al Amari de Ramallah où il grandit, il fait d’abord la connaissance de musiciens palestiniens de retour au pays après les accords d’Olso en 1993. Ramzi Abu Redwan décide alors de se lancer dans la musique.
L’année d’après, des professeurs du conservatoire d’Angers viennent faire un concert à Jérusalem et Ramallah. Ils proposent à deux Palestiniens de suivre des cours chez eux. Ramzis era l’un d’entre eux. Pendant ses années d’études – nous l’avions rencontré une première fois à ce moment-là – il réfléchit à l’idée d’une association qui donnerait la possibilité à d’autres enfants palestiniens d’apprendre gratuitement eux aussi la musique. Car depuis la Naaqba, la catastrophe qu’a représentée pour les Palestiniens la création de l’Etat d’Israël, la musique est passée au second plan. Et il en va de même pour des pans entiers de la culture.
Sept ans après un premier reportage, nous avons voulu savoir ce qu’était devenu Ramzi Abu Redwan, aujourd’hui âgé de 33 ans. Force est de constater que son parcours personnel, ainsi que celui de son association, Al Kamandjati (le violoniste en arabe) – les deux étant inséparables - sont couronnés de succès. La musique commence à se développer en Palestine.
Du coup, la dynamique enclenchée par l’ancien lanceur de pierres stimule d’autres acteurs du monde culturel en Palestine.
Et si la culture donnait enfin de l’espoir à un peuple qui ne voit aucune avancée politique dans les négociations avec les Israéliens ?
Ecouter Ramzi Aburedwan sur Deezer
Ramzi Aburedwan « Des pierres au violon, la résistance culturelle »
Originaire de Ramallah en Cisjordanie, Ramzi Aburedwan, trente-trois ans, est le fondateur de l’Ensemble national de musiques arabes de Palestine. Enfant, il a participé à la première Infitada avant de devenir un virtuose.
Vous dirigez l’Ensemble national de musiques arabes de Palestine, qui vient de se produire pour la première fois en France (1). Quand votre groupe est-il né ?
Ramzi Aburedwan. Notre Ensemble national de musiques arabes de Palestine est composé d’une cinquantaine de membres. Nous étions trente lors de notre première tournée en France. Ils viennent de toute la Palestine, certains sont des Palestiniens de « l’intérieur », Nazareth, Haïfa…, c’est-à-dire officiellement Israël. L’ensemble a été fondé en 2009 pour faire revivre la tradition de la musique classique du monde arabe. Les Palestiniens ont été très actifs dans la première moitié du XXe siècle et ils ont largement contribué à cette tradition. Il y avait à l’époque l’orchestre de Radio Jérusalem, créée sous mandat britannique, où des musiciens et orchestres jouaient en direct. C’est là que nous avons commencé à avoir les plus grands musiciens. Il y avait une forte connexion avec la radio du Caire et tout le reste du monde arabe. Malheureusement, toute cette tradition a été détruite par l’occupation et la création d’Israël en 1948. Depuis, il n’y a eu que des guerres.
Vous revisitez donc cette histoire par le biais de la musique, et lui donnez une tonalité particulière aujourd’hui ?
Ramzi Aburedwan. Oui absolument. En fait, nous voulons redécouvrir nos racines et les garder vivantes. Que s’est-il passé ? Après une occupation, une guerre, il y a toujours des bouleversements. C’est vrai pour la musique et la parole : elles changent. Le chant et la musique sont consacrés au chant patriotique et au folklore moderne. La musique classique, elle, est mise de côté, parce que l’occupation est une réalité. Les gens, les musiciens, les artistes ne peuvent y échapper et faire comme si elle n’existait pas. Actuellement nous sommes à une étape où, dans la littérature, avec Edward Saïd, ou dans la poésie, avec Mahmoud Darwich, on est avant tout palestinien, écrivain, poète, musicien. C’est une ode à l’amour. Les chants évoquent la mort, la joie, la vie réelle. Ils expliquent avec des paroles simples notre attachement à notre culture et à notre pays. Oum kalsoum, Sayed Darwich, Asmahan… nous voulons partager avec les gens de l’art pur. Cela ne veut pas dire ignorer le reste. Nous avons fait des petits changements en introduisant les chants d’Andalousie. Notre musique est exigeante, parce qu’il ne s’agit pas seulement de jouer. Il faut aussi faire des recherches, mettre tout sur le papier, réécrire des partitions, car la musique arabe est transmise oralement. Quand on est trente, il faut beaucoup d’unité et se mettre d’accord sur tout. Nous ne manquons pas d’artistes de talent pour y parvenir.
Vous êtes originaire de Ramallah et vous avez lancé des pierres contre les soldats israéliens. Comment êtes-vous passé de l’Intifada à l’alto ou au violon ?
Ramzi Aburedwan. Je suis né en 1979 à Bethléem. J’ai passé mon enfance et mon adolescence dans le camp de réfugiés d’Al-Amari à Ramallah, où mes grands parents se sont retrouvés après leur expulsion en 1948. Lorsque j’avais huit ans, en 1987, mon meilleur ami a été tué en rentrant de l’école, au cours d’une opération militaire israélienne. C’est alors que j’ai participé à la première Intifada. Une photo de moi en train de lancer des pierres a fait la une des journaux du monde entier. La musique est arrivée plus tard, par hasard, j’avais seize ans. Un jour, une femme à qui je vendais le journal dans la rue quand j’étais petit m’a proposé d’assister à un cours de musique donné par un Palestinien de Jordanie, Mohammad Fadel. J’ai tout de suite adoré ça et depuis je n’ai plus lâché le morceau. Après un an de cours au conservatoire national de musique Edward-Saïd (ESNCM) et un atelier d’été aux États-Unis, je suis entré en 1998 au conservatoire national de région d’Angers grâce à une bourse française et de l’ESNCM. En 2005, j’ai obtenu la médaille d’or en alto, en musique de chambre, en solfège.
Vous parlez d’Intifada culturelle. Qu’entendez-vous par là ?
Ramzi Aburedwan. Nous avons réussi, pas seuls bien sûr, avec la participation d’artistes palestiniens, à installer la résistance culturelle. Elle n’était pas du tout prise en considération par nos dirigeants au début du mouvement palestinien de résistance à l’occupation. La culture était ignorée et grâce au travail et à l’aide de beaucoup de gens, notamment au sein du centre Al Kamandjati (le violoniste, en arabe), il devient plus facile d’identifier la nature du combat que l’on mène et de s’y associer. En dix ans, je suis venu à la musique. Mais des pierres au violon, c’est le même combat que je poursuis. Je pense que la société palestinienne commence à le comprendre. Du côté israélien, nous n’avons pas encore résolu le problème. La colonisation continue au jour le jour. Nous n’en avons pas du tout fini avec ces constructions de logements illégales. C’est une politique qui nie l’identité et l’existence des Palestiniens. On peut détruire une maison, ériger un mur, un barrage, on ne peut pas voler votre identité et votre âme, la nôtre, c’est une âme de combat.
Est-ce dans cet esprit que l’école Al Kamandjati a été créée ?
Ramzi Aburedwan. Oui, sans aucun doute. Cette école a été fondée en 2002, lorsque j’étais étudiant à Angers. Il est primordial de pouvoir donner aux enfants palestiniens l’opportunité d’apprendre la musique pour qu’ils puissent vivre normalement comme n’importe quel enfant, qu’ils viennent de Cisjordanie ou du Liban, qu’ils habitent dans des villes, des villages ou des camps de réfugiés. Nous travaillons avec des professeurs venus du monde entier, nous collectons aussi des instruments et des partitions grâce aux dons de particuliers. Près de cinq cents élèves suivent notre enseignement, six d’entre eux étudient en France aux conservatoires de Bordeaux, Toulouse et Angers, un autre à Newark, en Angleterre. J’ajouterai que notre objectif n’est pas politique. Cela peut paraître poétique. Mais par le simple fait de prononcer « Palestine », on parle déjà politique. Pour nous, c’est une réalité quotidienne. En accueillant les enfants, nous profilons un nouveau paysage en Palestine. C’est notre résistance à nous.
(1) L’Ensemble national de musiques arabes de Palestine a joué notamment à Choisy-le-Roi, Creil, Toulouse, Cenon, Angers, Paris 20e, Stains, Bagnolet et Vitry-sur-Seine.
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