Association France Palestine Solidarité - Isère / Grenoble

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La stratégie d'Israël : occuper et punir ( par René Backmann, 2 /11/ 2011)

par René Backmann, Le Nouvel Observateur

 

La stratégie israélienne : occuper et punir

 

 La réplique d’Israël à l’admission de la Palestine à l’UNESCO résume, dans sa brutalité, la stratégie de l’actuel gouvernement israélien – stratégie qui fut aussi celle de nombre de ses prédécesseurs -  face aux Palestiniens : occuper et punir. Deux mesures ont été adoptées mardi par les huit principaux ministres du gouvernement Netanyahou pour protester contre le vote de l’Assemblée générale de l’UNESCO.

 

La première est la décision de construire  2000  logements dans des colonies des territoires occupés. La majeure partie de ces logements – 1650 - seront construits dans les colonies de Jérusalem-Est. Le reste viendra s’ajouter à deux colonies de Cisjordanie : Maalé Adoumim, à l’est de Jérusalem et Efrat, dans le bloc de colonies d’Etzion, au sud de Bethléem. La seconde est la suspension « à titre provisoire, jusqu’à ce qu’une décision définitive soit prise » des transferts de fonds destinés à l’Autorité palestinienne.

 

Ces décisions appellent plusieurs remarques.

La poursuite de la construction dans les colonies des territoires occupés est contraire aux dispositions des accords d’Oslo. L’article XXXI de l’Accord intérimaire dispose que « les deux parties ne doivent prendre aucune mesure de nature à changer de statut de la Cisjordanie  et de la bande de Gaza pendant la durée des négociations sur le statut final ».

 

Deux fois plus de colons depuis l’accord Oslo


 Cette interdiction de construire dans les colonies est également l’une des exigences de la Feuille de route  de 2003. La poursuite du développement de la colonisation a été à de multiples reprises critiquée et condamnée par les Nations Unies et de très nombreux Etats, dont les Etats-Unis, et l’Union européenne.

En dépit de ces dispositions Israël n’a jamais – depuis les accords d’Oslo de 1993 – cessé d’étendre la superficie de ses colonies et d’augmenter le nombre des colons Israéliens dans les Territoires occupés. Près de 250 000 colons israéliens étaient implantés, en 1993 dans la Bande de Gaza, en Cisjordanie et à Jerusalem-est.

 

La Bande de Gaza a été évacuée mais on compte aujourd’hui plus de 500 000 colons en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. Contre les dispositions des accords d’Oslo, contre les recommandations de la Feuille de route, contre les résolutions des Nations Unies, contre l’avis de la Cour internationale de justice de La Haye, Israël a poursuivi et amplifié la colonisation de la Cisjordanie et de Jerusalem-Est et construit un mur de séparation qui annexe de fait une partie importante de la Cisjordanie à Israël.

 

 L’Autorité palestinienne privée d’un tiers de son budget


 On sait que l’arrêt total de la colonisation est la condition mise par la partie palestinienne à la reprise des négociations. La décision qui vient d’être prise confirme qu’Israël, loin de chercher à créer les conditions d’une reprise du dialogue, s’efforce de rendre la mise au point d’un accord de plus en plus difficile en multipliant, sur le terrain les faits accomplis. Ce qu’un négociateur palestinien résumait, il y a quelques semaines par la formule suivante : « nous devons, avec Israël discuter du partage d’une pizza pendant qu’ils la mangent ».

 

La seconde décision prise mardi consistera à ne pas transférer à l’Autorité palestinienne  les droits de douane et de TVA prélevés par l’administration israélienne sur les produits destinés aux Territoires palestiniens qui transitent par les ports et aéroports israéliens. Pour le seul mois d’octobre, ce sont ainsi près de 60 millions d’euros dont les caisses de l’Autorité palestinienne seront privées.

Ce geste est loin d’être symbolique. Les droits prélevés par Israël pour le compte des Palestiniens représentent près de 30% du budget de l’Autorité. Ils sont généralement affectés au traitement des 140 000 fonctionnaires palestiniens. Dans une période où le budget palestinien accuse un déficit de plus de 200 millions d’euros, en raison de la négligence de certains donateurs, cette mesure est particulièrement douloureuse.

Cette technique de sanction ou de pression sur l’Autorité palestinienne est fréquemment employée par Israël. Chaque période de tension se traduit par un gel des transferts de fonds.

 

 Plus de laissez-passer pour les VIP de Ramallah


 En mai dernier, déjà, pour « punir » le Fatah d’avoir conclu un accord de réconciliation avec le Hamas, le ministre israélien des finances Youval Steinitz avait gelé pendant plusieurs semaines les transferts au bénéfice de l’Autorité palestinienne. Conscient que la coopération sécuritaire avec Ramallah est l’une des garanties de la sécurité d’Israël, le ministre israélien de la défense, Ehoud Barak, est généralement réservé devant les mesures qui gènent l’activité de l’autorité palestinienne. Il semble avoir protesté en vain contre le choix du cabinet restreint où sa position était minoritaire face à la volonté de punir.

 

Une troisième mesure de rétorsion est à l’étude. Elle consisterait à priver les principaux responsables de l’Autorité palestinienne des laissez-passer de VIP qui leur permettent de circuler en territoire israélien. Ce qui ne manquerait pas de compliquer et de retarder sérieusement  leurs déplacements.

 

Punir par la rétention des droits dus aux Palestiniens, punir par le durcissement des contrôles aux check-points, punir par les démolitions de maisons, les expulsions, les bouclages, les arrestations, les interdictions de circulation, le durcissement de la réglementation sur les déplacements ou le droit de résidence, punir par les liquidations, les raids militaires terrestres ou aériens. Depuis 2000, 6540 Palestiniens ont été tués par des Israéliens, civils ou militaires (et 1093 Israéliens par des Palestiniens), Avec l’occupation, la punition structure l’attitude israélienne face aux Palestiniens. La riposte à leur admission à l’UNESCO vient nous le rappeler. Occuper et  punir : on peut se demander s’il s’agi là des meilleures dispositions pour se préparer à négocier et pour envisager un jour de nouer des relations de bon voisinage.



03/11/2011

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